Comment écouter - 3 clés pour une écoute profonde
6 attitudes pour écouter (ou pas) et 3 manières de cultiver activement son écoute
Comment écouter l’autre ?
En écrivant cette édition j’ai eu peur de tomber dans des platitudes, d’enfoncer des portes ouvertes.
Et puis, je me suis rappelée la puissance de tous les moments où je me suis sentie réellement écoutée et la beauté de tous les moments où j’ai réellement écouté.
Je pourrais décrire ces moments comme des moments suspendus : un état où j’étais complètement là, et l’autre aussi, et ce qui se passait était important. Pas parce que le sujet du jour allait changer nos vies. Mais parce que nous étions pleinement là. Parce que nous nous faisions le cadeau d’une réelle écoute et d’un réel partage.
Dans un monde de plus en plus complexe, qui accélère, et de plus en plus polarisé (source : Anti-Chaos, Matthieu Dardaillon), retrouver des moments d’écoute est une des clés les plus puissantes pour :
Prendre soin des relations
Imaginer des solutions créatives aux problèmes complexes (qu’ils soient relationnels, organisationnels, économiques, politiques, sociétaux…)
Faciliter l’expression des autres personnes (plus quelqu’un se sent écouté·e, plus il ou elle parlera avec aisance et sincérité - une clé importante à garder en tête notamment pour les conversations inconfortables et/ou avec les personnes avec lesquelles vous avez du mal à dialoguer)
“Une fois que les personnes se sentent comprises, elles peuvent baisser leur garde”
Amanda Ripley High Conflict, why we get trapped and how we get out (un ouvrage fascinant sur la résolution de conflits à haute tension - résumé à lire à ce lien).
Sans écoute, nous n’entendons plus et ne voyons plus ce qui se passe pour les autres.
Nous n’entendons plus ce qui se passe chez les autres (avec la conséquence potentielle du déni de certaines réalités et/ou de polarisation). Nous ne voyons plus le champ des possibles.
L’absence d’écoute renforce la polarisation : d’un “nous” v.s “eux”, qui enferme, divise, et empêche de voir l’autre comme un·e partenaire.
“Une fois que nous avons un “eux” pour contraster avec “nous” (...) il est probable que nous coopérions moins avec l’autre groupe et plus probable que nous devenions hostiles” Amanda Ripley High Conflict, why we get trapped and how we get out (résumé à lire à ce lien).
Merci aux discussions et partages qui ont nourri cette newsletter, notamment lors des formations Radical Collaboration, à Eric Charlemagne sur notre conversation sur l’écoute en médiation, à MHD formation pour les subtilités de la reformulation, et à toutes les autres personnes qui ont contribué par leur incarnation de l’écoute à cette newsletter.
Ambiance musicale de cette newsletter
PS : rendez-vous le 8 juillet de 15h30 à 17h30 pour un atelier en ligne sur l’écoute, dans le prolongement de cette newsletter. Inscriptions à ce lien.
💡Le déclic de la semaine - Différents types d’écoute
Nous verrons dans un deuxième temps de cet article des pratiques qui peuvent aider à l’écoute, mais avant cela, prenons du recul sur ce qu’est l’écoute.
Si nous partons des définitions du Larousse, écouter peut vouloir dire
Être attentif à un bruit, à un son, à de la musique, etc., les entendre volontairement
Prêter attention à ce que quelqu'un dit pour l'entendre et le comprendre
Accepter d'entendre ce que quelqu'un a à dire, lui donner audience
Tenir compte de ce que dit quelqu'un ; suivre
Ce que je retiens de ces définitions : l’écoute est un acte volontaire, une attention portée à l’autre, et une prise en considération de l’autre.
Si nous creusons différentes manières d’écouter, la réalité est plus nuancée que écoute ou non écoute.
Pour cela, nous pouvons regarder les 6 attitudes de Porter, psychologue américain : avec différentes attitudes qui peuvent partir d’une intention d’écoute, mais finalement l’être plus ou moins.
“La plupart d’entre nous ne se sent pas entendu la plupart du temps. C’est parce que la majorité des personnes ne savent pas écouter. Nous allons directement à la conclusion. Nous pensons les comprendre alors que ce n’est pas le cas. Nous préparons notre prochain point avant que l’autre aie fini de parler” Amanda Ripley, High Conflict, why we get trapped and how we get out (résumé à lire à ce lien).
🧰L’outil de la semaine - L’arbre de l’écoute
Pour cette semaine j’avais envie de vous partager 3 éléments qui peuvent aider à cultiver une posture d’écoute, et à choisir activement d’écouter. Car écouter est un choix.
1. Les racines de l’écoute : la PRESENCE : être et rester présent·e
Ecouter, c’est un moment pour recevoir la parole de l’autre. Un peu comme une coupe qui est déjà pleine, cela peut être difficile d’écouter en étant déjà trop rempli·e d’idées / de sensations / de choses à faire.
Emma Collado m’avait partagé lors d’un stage l’acronyme ETE, issu de la Communication NonViolente :
Ai-je l’Envie d’écouter l’autre ?
Ai-je le Temps pour écouter l’autre / est-ce le bon moment ?
Est-ce que j’ai l’Energie disponible pour écouter pleinement ?
Il vaut souvent mieux de reporter un moment de partage et d’écoute que de le garder et d’écouter à moitié.
Quelques stratégies pour être et rester pleinement présent·e dans une conversation :
Choisir un cadre physique / temporel approprié
Par exemple : converser en marchant, se mettre dans une salle fermée, choisir un endroit avec peu de bruits…
Faire une transition avec le moment d’avant, comme pour déposer le manteau de nos conversations précédentes / préoccupations en cours au vestiaire
Par exemple : faire une pause de 5 minutes avant de démarrer un appel, se lever et s’étirer avant une nouvelle conversation zoom, noter tous les sujets à traiter dans le reste de la journée sur un carnet fermé pour pouvoir y revenir ensuite
Adopter une posture physique présente : où le corps est suffisamment engagé pour ne pas s’endormir, ni tellement engagé que seul l’effort physique est présent
Adopter une intention d’écoute de l’autre
Question pour vous : qu’est-ce qui vous aide à rester présent·e dans une conversation ?
2. Le tronc de l’écoute : une INTENTION claire
Nous l’avons vu dans le schéma des 6 attitudes de Porter plus haut, il y a plusieurs manières d’écouter. Et en soit, il y n’a pas de meilleure manière qu’une autre pour écouter dans l’absolu. Tout va dépendre du besoin de la personne à ce moment là dans la conversation.
Quand quelqu’un me signale un besoin d’écoute, j’aime lui demander ce dont il ou elle a besoin : De quoi as-tu besoin ?
De l’écoute simple ?
Que je reformule que ce tu me dis ?
Des conseils ?
D’être rassuré·e ?
Des idées ?
Cela me permet bien souvent d’éviter des conseils non sollicités, et d’être plus précise dans ma manière d’écouter l’autre.
Cela m’aide également à m’enlever la pression de tout devoir comprendre / poser des questions intelligentes / devoir aider l’autre personne.
3. Les feuilles de l’écoute : l’OUVERTURE au champ des possibles
Même avec l’intention d’écouter, parfois je me retrouve rattrapée par mes propres pensées, mes propres manières de voir la situation. A avoir envie de donner un conseil alors que ça n’est pas le besoin de l’autre. A vouloir comprendre dans tous les détails.
Ce qui m’aide à ces moments là est de garder mon ouverture d’esprit et ma curiosité.
Je m’imagine comme une exploratrice qui va découvrir le monde de l’autre personne, sa manière unique de voir les choses, d’appréhender la situation.
Cela ne veut pas dire que je serai d’accord automatiquement avec la personne, je me laisse le choix quand je retourne dans mon propre monde de ce que je prends avec moi. Mais cela me permet de vraiment écouter l’autre pour ce qu’il ou elle dit, plutôt que d’essayer d’adopter ma propre grille de lecture.
Et concrètement, cela peut ressembler à :
De la reformulation en écho : écouter les mots que mon interlocuteur·trice utilise et lui redire en miroir
De la reformulation synthétique : synthétiser ce que vous avez compris de l’autre personne
Attention : si vous aimez reformuler ce que les autres personnes vous disent, assurez-vous d’ouvrir la porte à ce qu’elles vous corrigent (parfois nos reformulations sont erronées). Par exemple : “corrige-moi si je me trompe, mais je t’entends me dire que… est-ce bien cela …”. “Et donc pour toi, ce qui se passe c’est… Est-ce que c’est ça ?”
❓ La question de la semaine : qui avez-vous envie d’écouter ?
Pour approfondir ce sujet :
High Conflict, why we get trapped and how we get out, Amanda Ripley
Pratice active listening, Greater Good Science Center
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Dans les éditions précédentes de Construire des Ponts
De la confiance à la demande d'aide - comment créer un cadre qui autorise à demander de l'aide
Réhabiliter le désaccord - et si nous avions besoin du désaccord ?
Et si nos organisations prenaient le temps du lien ? - comment inclure le soin comme un sujet récurrent dans une équipe
Sortir de l’escalade du conflit par la pause, faire une pause n’est pas une fuite
Sortir des conseils non sollicités - Soutenir avec écoute
Et si on créait plus de sécurité psychologique au travail ? Au lieu d’exiger plus d’authenticité.
Les limites, épisode 2 - Ecouter et respecter les limites des autres
Les histoires qu’on se raconte et comment les vérifier (ou pas) - le rôle des suppositions dans la communication
L’effet boomerang de l’honnêteté - comment sortir de l’honnêteté brutale
Faire une excuse en sincérité radicale - de la honte à la responsabilité, une invitation à s’excuser sans se justifier
Les ruptures professionnelles sont de vraies ruptures - comment mener nos ruptures professionnelles en prenant soin du lien ?
Laisser de la place à la colère - exprimer sa colère sans détruire les relations
Quand l’organisation prend soin des relations (tout n’est pas histoire de responsabilité individuelle)
Le pouvoir de l’appréciation - ou comment devenir supporteur / supportrice
Prendre soin des conflits (car ils sont inévitables, et utiles !)
Oser la sincérité radicale ( ce n’est pas l’honnêteté brutale ni l’empathie toxique)
Créer les conditions de l’écoute (ça ne suffit pas de bien écouter)
Dire non pour prendre soin de la relation (où vous découvrirez la carte de fidélité au non)
Coopérer avec ses concurrents (peut être découvrirez-vous de nouvelles zones d’opportunité)
Penser long terme (parfois les solutions que nous essayons sont de fausses bonnes idées)
Revenir à son intention (garder le cap, même en cas de conflit)
Cet article est placé sous la licence Creative Commons : Attribution - Partage dans les Mêmes Conditions CC BY-SA
Merci Lily pour cet article, cette image de l'arbre est super parlante et donc facile à retenir. C'est d'autant plus important quand il y a une situation conflictuelle ou une tension sous-jacente.